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Paris, le 11 novembre 2004 Allocution devant l'Association des avocats au Barreau du Québec en France

La version prononcée fait foi.

MINISTRE DÉLÉGUÉ AUX AFFAIRES INTERGOUVERNEMENTALES CANADIENNES ET AUX AFFAIRES AUTOCHTONES À L'OCCASION DU DÎNER OFFERT PAR L’ASSOCIATION DES AVOCATS AU BARREAU DU QUÉBEC EN FRANCE ET COPRÉSIDÉ PAR LES BÂTONNIERS DE PARIS ET DU QUÉBEC À L’HÔTEL DES ARTS ET MÉTIERS

Monsieur le Bâtonnier de Paris, Monsieur le Bâtonnier du Québec, Monsieur l’Ambassadeur du Canada en France, Monsieur le Délégué général du Québec à Paris, Monsieur le Président de l’Association des Avocats du Barreau du Québec en France, Chers amis français et québécois,

C’est une grande joie pour moi d’être parmi vous ce soir et d’assister à cette soirée qui souligne la traditionnelle rencontre des bâtonniers de Paris et du Québec. Je tiens à remercier Me Nicola Mariani et à lui transmettre mes plus amicales salutations. Me Mariani a eu la gentillesse de m’inviter à recevoir le titre de membre honoraire de l’Association des avocats au barreau du Québec en France et à vous adresser quelques mots à l’occasion de mon bref séjour, ici, à Paris, une ville extraordinaire dans laquelle j’ai eu le bonheur d’étudier pendant quelques années et que j’ai toujours un immense plaisir à revoir.

Comme nous le savons tous, la relation France-Québec est un terreau extrêmement fertile d’échanges, d’initiatives et de projets. Cette relation est établie sur la base des liens directs que la France et le Québec entretiennent depuis plus de quarante ans et qui ne cessent de se renforcer. Enracinée dans l’histoire, la relation France-Québec n’en est pas pour autant statique. On la décrit, avec raison, comme une relation en mouvement, qui a su évoluer avec le temps et s’adapter au contexte changeant, dicté par la modernité.

Dans sa dimension politique, cette relation repose avant tout sur un fait incontournable : la France demeure le principal allié du Québec sur la scène internationale et elle occupe toujours une place unique dans notre action diplomatique. Au fil des ans, des mécanismes ont été forgés pour assurer une mise en oeuvre efficace de la relation bilatérale qui permet à nos deux peuples de collaborer si étroitement dans autant de secteurs. Entre nous, il y a beaucoup plus que la vertu unificatrice de la langue et de sa pérennité ; il y a également un partage de valeurs qui amènent nos deux sociétés à se ressembler en dépit des distances géographiques et de nos appartenances respectives à des continents si différents. Dans tout cela, un élément prédomine. Il s’agit du respect, qui fait permet le développement continu de notre coopération dans un ensemble de domaines, en fonction des intérêts de nos deux sociétés. Bien sûr, cela ne nous empêche nullement de partager des priorités, telles que la modernisation de l’État, la sécurité, le développement durable, l’avenir des régions, la réussite scolaire, les effets du vieillissement sur la santé, la jeunesse. Nous restons conscients, cependant, qu’en raison des contextes différents dans lesquels la France et le Québec sont appelés à évoluer, il pourra nous arriver, tant de votre côté que du nôtre, de proposer des approches différentes face à des problèmes identiques. Y verrons-nous alors une pomme de discorde ? Un regard sur le passé laisse entrevoir que nous y trouverons plutôt l’occasion de nous enrichir mutuellement de nos expériences. C’est là, je crois, l’une des grandes forces de cette relation privilégiée entre la France et le Québec.

Une relation comme la nôtre, riche et diversifiée, comporte également une dimension économique. La France constitue, pour le Québec, un partenaire commercial de plus en plus important, particulièrement dans les secteurs de haute densité technologique. Ces dernières années, une centaine d’entreprises québécoises y ont ouvert une filiale alors que 250 entreprises françaises ont fait de même chez nous. Le Québec offre en outre à la France un accès privilégié aux Amériques ce qui, dans un contexte de mondialisation, permet à celle-ci d’entrevoir de meilleures perspectives de diversification de ses marchés. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que les premiers ministres Raffarin et Charest conduisent actuellement ensemble au Mexique, une mission commerciale regroupant des gens d’affaires français et québécois. Il s’agit d’une première, qui illustre avec éloquence la richesse de notre relation et les possibilités jusqu’ici inexplorées d’un rapprochement encore plus grand. Après plus de quarante ans d’échanges fructueux, l’innovation dans nos rapports est toujours au rendez-vous.

Au printemps dernier, le Premier ministre du Québec, Monsieur Jean Charest, se rendait en France dans le cadre des visites alternées de nos premiers ministres respectifs. Ceux et celles parmi vous qui ont eu l’occasion de suivre le déroulement de cette visite et de prendre connaissance du bilan qui en a été dressé, ont pu constater à quel point la nouvelle alliance franco-québécoise, scellée au mois de mai 2003 lors de la visite au Québec du premier ministre de la France, Monsieur Jean-Pierre Raffarin, est riche en réalisations et en perspectives.

La France et le Québec ont alors clairement exprimé leur volonté de renforcer leurs échanges économiques, scientifiques et techniques. Ils ont aussi décidé d’inclure au coeur de leur relation une dimension régionale plus forte, dans le cadre de ce qu’il est maintenant convenu d’appeler « la coopération décentralisée ». Cela n’est pas anodin. L’idée, encore une fois, est d’élargir les horizons de notre coopération en tirant avantage de la diversité de nos régions sur le plan des ressources, tant humaines que naturelles. Il y a là, j’en suis convaincu, un potentiel énorme d’initiatives et de réalisations profitables non seulement en raison de leurs retombées économiques locales, mais aussi de leur impact possible sur le développement, voire la survie des régions.

Nos premiers ministres ont également profité de la rencontre pour renouveler leur ferme intention de poursuivre leur engagement conjoint à la défense et à la promotion de la diversité culturelle. Je me réjouis de constater combien les philosophies de la France et du Québec convergent à l’égard de cet enjeu de toute première importance pour nos deux sociétés. La France et le Québec entendent donc, au cours des prochains mois, consacrer des efforts soutenus vers une action commune visant à susciter, au sein des forums internationaux directement concernés, l’ébauche d’un instrument de protection juridique de la diversité culturelle. Il importe de garantir aux États et aux gouvernements le droit de définir leur propre politique culturelle et de pouvoir consacrer à la mise en oeuvre de celle-ci toutes les ressources jugées nécessaires.

Il est bon que la France et le Québec fassent ainsi front commun pour promouvoir la cause de la diversité culturelle. Inutile de dire que nous aurons bien besoin de renforcer notre amitié, de bâtir des ponts entre nos cultures respectives et de mettre à profit notre réseau unique de coopération pour inscrire pleinement la langue française dans le courant de la mondialisation, dans un courant de mondialisation à visage humain.

Heureusement que l’on peut compter, pour ce faire, sur la richesse et l’enracinement des relations et des partenariats tissés entre la France et le Québec au fil des ans. Votre présence, ici, à ce dîner, l’existence même de l’Association des avocats du barreau du Québec en France et l’honneur qui m’a été rendu ce soir témoignent de façon tangible de la vitalité de ces liens. J’en suis personnellement touché et vous en remercie encore une fois.