La version prononcée fait foi.
Monsieur le Président national de l’Association Québec-France,
Monsieur le Vice-Président national de l’Association France-Québec,
Monsieur l’Attaché culturel du consulat général de France à Québec,
Monsieur le Président du comité organisateur du Congrès international des associations Québec-France et France-Québec,
Chers amis français et québécois,
Je suis très heureux d’être ici ce matin pour procéder avec vous à l’ouverture du 14e Congrès international des associations Québec-France et France-Québec, dont le thème, Heureux d’être ensemble; vivre nos différences, résume assez justement, me semble-t-il, cette relation aux multiples facettes que nous, Québécois et Français, avons su développer au fil des ans. Ce grand réseau d’amitié qui est le nôtre témoigne assurément de la richesse et de l’enracinement de nos liens mutuels. C’est donc avec grand plaisir que je souhaite la bienvenue à nos amis français qui nous font l’honneur de leur visite en Outaouais. Je tiens aussi à remercier l’Association Québec-France, et particulièrement sa régionale de l’Outaouais, pour la confiance qu’elle m’a témoignée en me demandant d’assumer la présidence d’honneur de cet événement.
Dans un cadre amical et hospitalier, ce congrès est avant tout une occasion renouvelée pour nous tous de célébrer notre langue commune, mais aussi de faire le point sur un certain nombre de réalisations en vue de dégager de nouvelles perspectives pour notre action future. Mes propos feront donc écho au thème général de cette rencontre, lequel souligne admirablement le fait que nous partageons certaines caractéristiques et certaines valeurs, tout en étant différents à bien des points de vue.
Mais, d’abord, j’aimerais vous parler de ce qui fait que nous sommes heureux d’être ensemble, c’est-à-dire de ce que nous avons en commun.
Car, aujourd’hui, beaucoup de choses nous lient, bien que les vicissitudes de l’histoire nous aient longtemps contraints à l’isolement de part et d’autre. En effet, il n’est pas inutile de rappeler que, dès la fin du Régime français, en 1759, les relations entre la métropole française et sa colonie nord-américaine ont été brusquement rompues. Ce n’est qu’au XXe siècle, et plus précisément au cours des années 50, que le Québec a commencé à manifester une volonté de nouer ou, devrais-je dire plutôt, de renouer des relations particulières avec la France.
À l’orée des années 60, au moment de la Révolution tranquille, une nouvelle ère de coopération s’est d’ailleurs ouverte entre la France et le Québec. Cette ère a notamment été marquée par la création, en 1961, de la Délégation générale du Québec à Paris, une institution qui a fortement contribué à façonner la personnalité internationale du Québec. Dès 1964, on vit se multiplier les échanges d’enseignants, d’étudiants, de scientifiques, d’industriels et de techniciens entre la France et le Québec.
Quelques années plus tard, une préoccupation pour la qualité et le statut du français commença également à se manifester avec beaucoup de vigueur chez nous. Il faut dire que le Québec, placé aux marches de l’anglophonie nordaméricaine, a souvent agi comme révélateur quant à la situation réelle du français. En matière de travaux terminologiques, qui furent de tout temps l’un des axes majeurs de la coopération France-Québec, c’est nous, Québécois, qui avons d’abord tiré profit des premières missions de francisation, puisque les vocabulaires du travail couvrant la presque totalité des grands domaines de l’activité économique du Québec étaient alors fortement anglicisés, ce qui n’était pas le cas en France à l’époque.
Avec l’adoption, en 1977, de la Charte de la langue française, mieux connue sous le nom de Loi 101, le Québec s’est doté d’une réglementation et de politiques en matière linguistique qui consacrèrent le français comme langue officielle, publique et d’usage commun. Au même moment, le travail de francisation du traitement terminologique des vocabulaires issus de la révolution technologique et informatique s’est étendu et approfondi, permettant ainsi au Québec de rejoindre la France au rang de chef de file en matière de normalisation terminologique en français. Au cours de ces années cruciales, nos communications , fondées sur le principe politique d’une continuité linguistique entre les deux États, furent nombreuses et favorisèrent les échanges d’idées, de savoir-faire, de produits, d’experts et d’expériences.
Mais une relation riche et diversifiée comme celle qui s’est établie entre la France et le Québec comporte d’autres dimensions. Sur le plan économique, notamment, la France constitue pour le Québec un partenaire commercial de plus en plus important, particulièrement dans les secteurs de haute densité technologique. En outre, le Québec constitue pour la France un accès privilégié aux Amériques, ce qui, dans un contexte de mondialisation, permet à celle-ci d’entrevoir de nouvelles perspectives de diversification de ses marchés.
Par ailleurs, la nouvelle alliance franco-québécoise, scellée au mois de mai 2003 par la visite au Québec du premier ministre français d’alors, monsieur Jean- Pierre Raffarin, est déjà riche de réalisations. Qu’il me suffise de mentionner les rencontres d’affaires France-Mexique-Québec, qui se sont tenues à Mexico du 16 au 19 novembre 2004, en présence des deux premiers ministres, et auxquelles ont notamment participé près de 350 petites et moyennes entreprises, dont 94 québécoises et 74 françaises.
Ainsi, forte des liens directs entretenus depuis quarante ans, la relation entre la France et le Québec est, plus que jamais, un terreau extrêmement fertile d’échanges, d’initiatives et de projets. En outre, et cela me paraît très important, ce qui en fait toute la force, c’est que la relation France-Québec n’est pas la chasse gardée d’un parti politique et ne découle pas d’une idéologie en particulier; elle transcende plutôt les clivages politiques et fait l’objet d’un large consensus, et ce, tant en France qu’au Québec. Pour nous, Québécois, cette relation repose avant tout sur le fait que la France, qui occupe une place unique dans notre action diplomatique, demeure un allié indispensable sur la scène internationale. En effet, c’est avec l'appui de la France que nous avons pu parler de notre propre voix au sein d’une organisation internationale et devenir membre à part entière de la Francophonie. D’une certaine manière, nous pouvons dire que cette relation directe fut déterminante dans le développement du Québec contemporain.
Cependant, même si elle est enracinée dans l’histoire, notre relation privilégiée n’en est pas pour autant statique. On la décrit au contraire, et avec raison, comme une relation en mouvement, parce qu’elle a su évoluer avec le temps et qu’elle continuera de le faire, le monde ayant beaucoup changé depuis une ou deux décennies. Ne voyons-nous pas, en effet, s’édifier de grands ensembles économiques et politiques et se briser, par le fait même, le monopole traditionnellement exercé par les gouvernements nationaux? Et cela ne nous indique-t-il pas que toute la problématique du français devra désormais être comprise et analysée à la lumière de cette nouvelle dynamique caractérisée par la mondialisation des échanges et la « globalisation » des marchés, mais aussi par la technicisation de l’information, le multilinguisme obligé d’un nombre de plus en plus grand de locuteurs et les exigences accrues quant à la qualité de la langue écrite et parlée?
Dans ce paysage totalement recomposé, la solidarité franco-québécoise doit être plus que jamais le moteur d’une nouvelle solidarité des pays de langue française, car, au-delà de la vertu unificatrice de la langue, il y a désormais l’enjeu majeur que constitue sa pérennité à l’échelle mondiale.
Il faut dire que peu de nations ont un intérêt aussi vital que le Québec au rayonnement international du français, ainsi qu’à la réussite du grand projet francophone. Cela s’explique évidemment par le fait que le Québec puise dans sa langue une part importante de son identité. Sa propre survivance en tant qu’État francophone majoritaire sur un continent où il est démographiquement si faible dépend, dans une très large mesure, de la capacité du français à exprimer la modernité, ainsi que de la mobilisation orchestrée et soutenue des États de langue française.
Le projet francophone consiste donc essentiellement à travailler tout autant à l’élargissement de la place du français, langue internationale, qu’à la consolidation de l’usage du français dans l’espace francophone en construction. Ce n’est pas une mince tâche, car si l’on peut se réjouir du fait que la Francophonie compte aujourd’hui une cinquantaine de pays, il faut bien admettre que nombre d’entre eux ne sont francophones que dans une faible mesure, tandis que d’autres n’auront toujours, du fait de leur taille modeste, qu’une influence très relative dans les affaires mondiales. En outre, s’il existe bel et bien des rapports de collaboration entre les organisations vouées au développement de la coopération en français et celles qui se consacrent directement à l'instrumentation, à la défense et à la promotion de notre langue commune, ces rapports devront assurément être renforcés, si l’on veut que les actions de la Francophonie s’inscrivent dans une perspective politique plus forte et mieux définie. Au-delà des intérêts particuliers des uns et des autres, la défense du français et l’édification d’une communauté francophone internationale dynamique constituent des actions non seulement en faveur de la consolidation du statut de notre langue à l’échelle internationale, mais également en faveur de l’universalisme et du pluralisme, lesquels sont les antidotes au nivellement des cultures et des particularismes.
Pourtant, malgré les difficultés que je viens d’évoquer, le projet francophone est loin d’être irréalisable puisque, à l’échelle mondiale, notre langue jouit encore aujourd’hui d’une position de premier plan. En effet, parlée par 200 millions de personnes sur tous les continents, elle se classe au deuxième rang mondial pour le nombre de pays où elle a le statut de langue officielle. Elle continue d’être perçue, par un très grand nombre de locuteurs francophones et francophiles disséminés un peu partout sur la planète, comme un facteur de réussite et de promotion sur le plan personnel et comme une excellente passerelle de communication sur le plan international. La France et le Québec, qui sont les deux pôles majeurs de la Francophonie en Occident, doivent faire en sorte que cette position de force, qui nourrit le prestige de notre langue dans le monde, soit maintenue et consolidée. C’est là notre premier devoir à tous. Je fais le pari que cette entreprise sera couronnée de succès et que nous saurons, tous ensemble, faire face aux nouvelles exigences dictées par la modernité.
Quoi qu’il en soit, dans la configuration des rapports que le Québec entretient sur la scène internationale, la France occupera toujours une place privilégiée. Il est nécessaire de le rappeler, car certains pourraient croire que l’accroissement de nos liens avec nos voisins des Amériques est le signe d’une perte d’intérêt pour nos relations avec la France, mais il n’en est rien. Tous comprendront cependant que le Québec veuille prendre acte de l’importante dynamique continentale dans laquelle il se trouve et qu’il se gouverne en conséquence, c’est-à-dire qu’il occupe la place qui lui revient dans cet environnement géopolitique.
À cet égard, je tiens à rappeler que le Québec se reconnaît une responsabilité particulière envers la Francophonie des Amériques et qu’il entend exercer, au sein de celle-ci, un leadership rassembleur. Le Québec a en effet un intérêt manifeste à regrouper les acteurs francophones du continent et à contribuer à canaliser les efforts et les moyens que ceux-ci déploient pour assurer la pérennité du français.
Voilà pourquoi le gouvernement du Québec souhaite stimuler l’action francophone sur le continent par la mise sur pied d’un Centre de la francophonie dans les Amériques. Ce centre, dont la création est prévue pour l’automne 2006, permettra à tous les francophones et francophiles de notre hémisphère de resserrer leurs liens. Les réalisations de cette grande famille francophone des Amériques, dans tous les domaines de son développement et de son affirmation, y feront l’objet d’une promotion à grande échelle. La France, toujours très présente en terre d’Amérique, pourrait, et nous le souhaitons vivement, participer à la mise en oeuvre de ce projet d’envergure.
Mais, si le rayonnement du français est important dans les Amériques, il l’est tout autant, sinon plus, à l’échelle de la planète, puisque le nouvel ordre mondial, qui vient bouleverser nos habitudes et nous forcer à réaligner nos positions, fait également en sorte que l’avenir du français au Québec et en France soit désormais lié étroitement à la présence et à l’usage de cette langue dans le monde. C’est bel et bien à l’échelle planétaire que se jouera le sort des grandes langues universelles qui, tout en ayant chacune leur sphère d’influence, sont également en concurrence les unes avec les autres, face à l’anglais, devenu la langue de communication internationale. À la lumière de cette nouvelle réalité, mais aussi avec l’intention de faire contrepoids à l’homogénéisation des cultures, le Québec et la France ont bataillé ferme sur la scène internationale pour défendre le droit absolu des gouvernements à soutenir activement le développement culturel de leurs sociétés. À cet égard, ils ont appuyé le projet de Convention sur la diversité des expressions culturelles, adopté le mois dernier à l’UNESCO par une très forte majorité de pays. Cette convention internationale consacre le droit des États et des gouvernements à maintenir, développer et mettre en oeuvre des politiques de soutien à la culture et à la diversité culturelle. Elle définit également le droit applicable en cette matière, tout en faisant état d’une volonté d’ouverture aux autres. La diversité culturelle suppose, en effet, respect et dialogue. Favorisant l’expression de visions multiples, elle est tout le contraire de l’enfermement dans le quant-à-soi des cultures. Ainsi fait-elle contrepoids à la pensée et à la culture uniques. Qu’on se le dise, la place du français à l’échelle mondiale dans le contexte de la diversité culturelle est désormais inhérente à notre identité de francophones.
Chers amis, c’est tout cela, c’est-à-dire ces 40 années de coopération francoquébécoise, nos efforts communs pour consolider et renforcer la Francophonie et notre combat en faveur de la diversité culturelle, qui nous unit. Ce qui nous unit, c’est aussi ce passé que nous partageons, cette attirance que nous éprouvons l’un pour l’autre, cette amitié que nous perpétuons. Nous sommes tout simplement heureux d’être ensemble, comme le dit si bien le thème de ce congrès, toujours prêts à mieux nous connaître, à nous découvrir réciproquement et à fraterniser.
Mais il n’y a pas que ce qui nous unit qui compte : il y a aussi ce qui nous distingue et ce qui nous amène à vivre nos différences.
Car nous sommes différents! En effet, fondée sur sa géographie et son histoire particulières qui le placent au confluent de deux grands univers culturels, la vocation de carrefour qui est celle du Québec s’incarne depuis longtemps non seulement dans les relations qu’il a su développer avec la France, mais également dans ce qu’il est convenu d’appeler son américanité. Il faut dire que le rapport des Québécois à l’Amérique remonte à l’époque de l’exploration tous azimuts du continent nord-américain, depuis la baie d’Hudson jusqu’à la Nouvelle-Orléans, en passant par le centre des États-Unis et la région des Grands-Lacs. Cette conquête des grands espaces constitue l’un des traits marquants de l’américanité. La dynamique québécoise en a été imprégnée dès l’origine et elle en est fortement marquée encore aujourd’hui. Déjà, à l’époque des grandes découvertes, alors que l’Europe était très peuplée et que l’agriculture y avait fait disparaître une grande partie des espaces sauvages, faire l’expérience du Nouveau Monde pour les premiers explorateurs européens, c’était aller à la rencontre de la grande nature, c’était aussi faire corps avec elle et s’y adapter peu à peu pour en tirer sa subsistance. Cela a conditionné l’imaginaire des Québécois et se reflète, même de nos jours, dans notre façon d’être et d’interagir avec le monde.
L’américanité, c’est d’abord une réalité géographique aux implications identitaires obligées, laquelle se rapporte, en fait, à tout ce qui se trouve en sol d’Amérique et qui, à ce titre, contribue à façonner l’âme et l’identité des sociétés qui y vivent. Elle s’incarne également dans d’autres traits culturels, par exemple dans l’égalitarisme des rapports sociaux et dans la mobilité personnelle, ainsi que dans le désir d’affranchissement de tout lien de tutelle, quel qu’il soit. Ainsi donc, son américanité et sa francitude font la personnalité originale du Québec et résument toute sa singularité. Le Québec exprime en français la modernité nordaméricaine. Là se situe l’essence même de la différence qu’il a à offrir à la francophonie.
Cette différence ne porte pas que sur des détails, bien au contraire. Tout en partageant la même langue, le Québec et la France n’ont pas le même imaginaire, et notre culture, quoique d’expression française, ne saurait être confondue avec la culture française. L’identité québécoise s’est en effet forgée à partir des différents métissages qui l’ont modelée. À cet égard, le Québec, terre d’immigration, s’est nourri successivement à même la richesse du substrat amérindien, ainsi que des importantes influences culturelles qui lui sont venues de la France, bien sûr, mais également, et dans une large mesure, des îles Britanniques et des États-Unis. En d’autres termes, les Québécois ne sont pas des Français vivant en Amérique. Il ne sont pas non plus des Américains parlant français. Ils sont plutôt des… Québécois, c’est-à-dire des personnes dont la culture est unique en ce qu’elle a été façonnée par les apports variés dont j’ ai parlé précédemment, mais aussi en ce qu’elle a été forgée par le climat, la géographie, l’histoire et par nombre d’autres facteurs qui ont contribué à sa singularité. Cette culture s’est développée en ce coin de l’Amérique du Nord, contre toute attente, et s’y est même épanouie.
Nos différences culturelles s’étendent également à nos institutions politiques, juridiques et constitutionnelles. En effet, à la seule exception – tout de même importante – de notre droit privé de tradition civiliste, on ne trouve, dans le système politique et le corpus de droit public dans lequel évolue le Québec, que peu d’éléments d’inspiration française. Notre régime parlementaire, l’organisation du gouvernement, notre système électoral ainsi que le cadre constitutionnel qui nous régit, bref, toute notre culture politique est essentiellement le fait de notre héritage britannique, auquel s’ajoute cependant une dimension proprement canadienne depuis 1867.
Une autre distinction fondamentale tient évidemment aux statuts différents de la France et du Québec sur le plan étatique. Alors que la France est un État unitaire pleinement souverain, le Québec est un État membre d’une fédération, la fédération canadienne.
Les Québécois comptent d’ailleurs beaucoup sur leur Assemblée nationale et sur leur gouvernement pour défendre leurs intérêts, leur autonomie et leur spécificité au sein de l’ensemble canadien. Aussi le fédéralisme est-il une clé importante pour comprendre les aspirations et les enjeux qui ont historiquement animé et continuent d’animer la vie politique québécoise. Être Québécois, c’est plus que jamais devoir relever le défi constant de préserver une identité propre au coeur même du Canada, c’est-à-dire au coeur d’un projet politique plus vaste.
Compris de cette façon, l’enjeu identitaire du Québec au sein de la fédération canadienne fait écho – du moins, je le crois – à la réflexion engagée en France et partout en Europe quant à l’avenir de l’intégration européenne. Cette réflexion pose en effet tout le problème de la sauvegarde des identités dans les grands ensembles multinationaux ou supranationaux en voie d’édification dans le monde. Il me semble que, malgré leurs cultures politiques différentes, nos deux nations sont interpellées de semblable façon par cette question cruciale, qui pourrait se résumer ainsi : comment une nation peut-elle s’investir dans un grand ensemble politique tout en préservant sa différence et ses repères identitaires essentiels, que ce soit sur le plan linguistique, culturel ou social ?
Cette question se pose avec une acuité toute particulière dans le cas de l’Europe, composée de nations ayant connu, au fil des siècles, d’innombrables bouleversements politiques et économiques, des mutations sociologiques et culturelles profondes, des guerres dévastatrices aussi bien que des renversements d’alliances qui ont changé le cours de l’histoire et dont les répercussions se font encore sentir aujourd’hui. Plusieurs siècles d’histoire y ont façonné des identités nationales très fortes que la proximité géographique, les communications instantanées et la coopération rapprochée depuis quelques décennies n’ont encore que très peu remodelées.
En réalité, tant l’expérience canadienne que l’expérience européenne démontrent que, de nos jours, le défi des gouvernements est de bâtir avec la population des projets politiques, économiques et sociaux qui répondent à ses aspirations et qui sont assez souples pour permettre à des groupes diversifiés de s’y reconnaître et de s’y épanouir. Concrètement, cela revient à dire que la préservation de l’identité du Québec au sein du Canada et de celle de la France au sein de l’Europe constituent les meilleurs gages du rayonnement de la langue française dans le monde.
En terminant, j’aimerais vous dire à quel point je me réjouis de constater aujourd’hui que les associations Québec-France et France-Québec, dont les activités sont axées non seulement sur l’histoire, mais également sur les échanges de toute nature et sur les enjeux de société les plus actuels, contribuent de façon substantielle à la consolidation de la relation privilégiée qui existe entre nos sociétés respectives.
Au nom de la population de l’Outaouais, je vous exprime aussi ma plus vive reconnaissance pour le travail remarquable, passionné et soutenu que vous accomplissez en faveur de l’enracinement et de l’épanouissement de la langue française. La langue française est belle et inspirante. Elle est langue de poésie et de créativité, de sensibilité, mais aussi de rigueur. Il nous appartient à tous de la chérir, de la préserver et de la promouvoir. Il nous appartient aussi de convaincre les jeunes d’en faire autant. Car, ne l’oublions pas, c’est sur la jeunesse que repose surtout l’avenir de notre langue et de la Francophonie.
Sur ce, je souhaite à chacun et chacune d’entre vous un très fructueux congrès, ponctué de belles découvertes dans cette magnifique région de l’Outaouais québécois. Merci.