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Salle du Conseil législatif, hôtel du Parlement, le 7 novembre 2006 Allocution du ministre Benoît Pelletier à l’occasion du lancement de la Politique du Québec en matière de francophonie canadienne

La version prononcée fait foi.

Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur le Ministre d’Entremont,
Madame la Sénatrice Chaput,
Mesdames et Messieurs les présidentes, présidents, dirigeantes, dirigeants et membres des associations francophones du Canada,
Chers collègues députés et ministres,
Distingués invités,
Mesdames et Messieurs,

À tous ceux et celles qui sont interpellés par la situation de la langue française au Canada et dans les Amériques, je peux dire aujourd’hui que le Québec est et restera un acteur déterminant, mais aussi un acteur résolu face aux défis que les cultures d’expression française doivent maintenant relever. Le leadership que le Québec entend exercer sera résolument tourné vers l’avenir. Il sera porteur de partage et de solidarité.

Chers amis, il ne s’agit pas là d’une vaine utopie, mais bien du pari que prend le gouvernement du Québec d’assurer, en étroite collaboration avec les communautés francophones et acadiennes, la pérennité du fait français pour les générations à venir. Or, ce pari, nous lui donnons, ce matin, la forme d’un engagement concret, nous le transcrivons dans un outil dont je suis fier : la nouvelle Politique du Québec en matière de francophonie canadienne.

Cette nouvelle politique est le résultat d’un long travail de concertation effectué au Québec et auprès des communautés francophones et acadiennes. Elle cristallise une vision partagée de la francophonie canadienne, vision qui conduit à des actions concrètes du gouvernement du Québec et qui, espérons-le, assurera à la francité un avenir brillant. Mais cette vision porte aussi un changement important de perspective quant à la relation que le Québec entretient historiquement avec les communautés francophones et acadiennes.

D’abord, laissez-moi vous dire combien je tiens pour déterminant le retour, depuis le printemps 2003, du Québec au sein de la francophonie canadienne. Tout en rappelant que le rayonnement de la langue française partout au Canada et sur le continent est un élément essentiel de la prospérité politique, économique, sociale et culturelle du Québec, nous avons affirmé que la participation active du Québec à la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne était aussi un élément indispensable de la pérennité du fait français au Canada.

Nous avons voulu souligner que le nouveau leadership du Québec au sein de la fédération canadienne passe par cette participation, mais également par :

  • la signature d’ententes de coopération intergouvernementale en matière de francophonie canadienne. Le Québec en a déjà signé cinq, sous le gouvernement de Jean Charest, avec l’Alberta (2004), le Yukon (2004), la Colombie-Britannique (2005), le Nouveau-Brunswick (2006) et l’Ontario (2006), et il poursuit des négociations avec Terre-Neuve-et-Labrador et les Territoires-du-Nord-Ouest;
  • par la tenue du Forum de la francophonie de mai 2004 qui a lancé les travaux de révision de la Politique en matière de francophonie canadienne;
  • et par une présence accrue du premier ministre ― il était encore récemment au Manitoba ― et de moi-même dans les communautés francophones et acadiennes.

La nouvelle Politique du Québec en matière de francophonie canadienne est ainsi, d’une part, l’indication que le Québec entend jouer un rôle déterminant au sein de la francophonie canadienne et, d’autre part, le signal que les communautés francophones et acadiennes, au premier chef, mais aussi que les immigrants francophones et les francophiles sont des interlocuteurs et des acteurs extrêmement importants pour la défense et la promotion du fait français en Amérique du Nord.

Cela dit, à cette nouvelle orientation, il faut ajouter au moins deux autres éléments pour bien comprendre pourquoi la nouvelle Politique du Québec en matière de francophonie canadienne était devenue indispensable.

Premièrement, il est indéniable que le contexte juridico-linguistique au Canada a beaucoup évolué au cours des dernières années. Cette situation a donné lieu à deux développements d’importance. D’abord, ce contexte a été marqué par la reconnaissance, par les tribunaux supérieurs du Canada, que c’est le français et non l’anglais qui a besoin de protection au pays. Ensuite, les tribunaux ont établi qu’il fallait, dans l’application des droits linguistiques, tenir compte des disparités réelles qui existent entre les minorités anglophone et francophone, ou, en d’autres termes, de la situation démolinguistique.

Deuxièmement, il fallait également reconnaître que la mondialisation des échanges et des communications, l’explosion des nouvelles technologies, l’anglicisation de la sphère commerciale et culturelle internationale et les menaces d’acculturation sont autant de bonnes raisons qui commandent une action concertée en vue de la promotion de la langue française au Canada.

Une vision nouvelle

Laissez-moi maintenant vous présenter succinctement la nouvelle Politique. Comme elle vise à ce que les francophones et les francophiles se rassemblent afin de défendre et de promouvoir avec plus de poids la langue et les cultures d’expression française au Canada, la Politique s’appuie sur une vision claire de l’avenir.

La vision que le gouvernement du Québec souhaite mettre en avant repose sur deux principes fondamentaux. D’abord, sur celui selon lequel les francophones doivent renforcer leurs relations. Conscients de leur force, mais vulnérables lorsque divisés, les francophones du Québec et ceux du reste du Canada doivent consolider leurs liens et établir des partenariats solides et concrets, afin d’accroître leur présence et leur influence partout au pays.

Ensuite, et j’insiste là-dessus, la nouvelle vision repose sur le fait que le Québec doit être un leader rassembleur. Parce qu’il est au coeur de la francophonie canadienne et qu’il constitue le seul État francophone en Amérique du Nord, le Québec a une responsabilité particulière à l’égard des communautés francophones et acadiennes, responsabilité qui l’appelle à jouer un rôle plus actif auprès de ces dernières. Il s’agit d’une responsabilité historique. Il s’agit aussi, et peut-être surtout, d’une responsabilité actuelle.

Les valeurs

Mais pour exercer adéquatement son leadership, le Québec doit non seulement tenir compte de la diversité des cultures d’expression française au pays, mais il doit également appuyer ce leadership sur des valeurs partagées par les communautés francophones et acadiennes.

S’agissant des valeurs fondamentales de la Politique, je pense qu’il faut d’abord souligner l’importance de l’action et de l’innovation, dans la mesure où l’une et l’autre nous ont permis, à nous, francophones, d’ouvrir de nouvelles voies en ce qui concerne la protection et la promotion du fait français au Canada.

La recherche de justice et d’équité est une deuxième valeur importante de l’action du Québec. À travers elle, s’offre à nous la possibilité de protéger et de promouvoir la diversité culturelle et la langue française au Canada, dans les Amériques et dans le monde. À mes yeux, le droit de protéger la culture dans tous ses particularismes est un enjeu de justice qui doit être défendu par toutes les démocraties libérales.

Enfin, comme troisième valeur, on doit s’assurer que la promotion de la diversité, mais également que la solidarité qui se nourrit de la diversité, soient des outils essentiels au maintien de la dualité linguistique et de la pluralité culturelle au Canada.

Voilà pour les motivations et les fondements de la nouvelle Politique du Québec en matière de francophonie canadienne. La richesse de ces orientations et de ces principes nous conduit directement à la raison d’être de la Politique, au sens concret qu’elle doit donner à nos aspirations en favorisant un certain nombre d’actions et en mettant en oeuvre des leviers et des mécanismes de concertation.

Les secteurs d’intervention

Sur le plan des secteurs d’intervention, je vous confirme que les secteurs clés que sont la culture et les communications, l’éducation, le développement économique et la santé vont continuer de faire l’objet d’interventions prioritaires de la part du gouvernement du Québec. Mais je peux également vous annoncer que la Politique élargira désormais son champ d’action et s’étendra à d’autres secteurs qui nous semblent vitaux pour l’avenir de la francophonie canadienne. Ainsi, seront soutenues les actions favorisant le rayonnement du français dans des domaines tels que la petite enfance, la jeunesse, l’immigration, la justice, le développement durable et les technologies de l’information.

Sur le plan culturel, Coup de coeur francophone par exemple, un événement que nous appuyons financièrement depuis plusieurs années et qui permet à des artistes de la francophonie de se produire dans de nombreuses villes canadiennes, constitue un modèle porteur de bénéfices tangibles. En matière de services d’éducation aux enfants, le ministère de la Famille, des Aînés et de la Condition féminine est déjà étroitement associé à la mise sur pied de centres de la petite enfance dans les communautés francophones et acadiennes, ce qui constitue, à mon avis, un autre bel exemple de collaboration portant sur une priorité partagée par tous les francophones du pays.

Les leviers d’action

Cela dit, le maintien et le développement de nouveaux axes de collaboration nécessitent l’utilisation optimale de nombreux leviers d’action.

Dans un premier temps, nous continuerons de favoriser les partenariats et le réseautage, et ce, parce que l’expérience nous indique qu’en général, les projets soutenus par deux ou plusieurs partenaires donnent des résultats plus visibles et plus durables pour les communautés. Le gouvernement du Québec s’assurera que la société civile québécoise soit davantage informée des possibilités que lui offre la Politique quant à l’enrichissement des réseaux et des partenariats entre les francophones du Canada.

La participation pleine et entière du Québec à la francophonie canadienne implique également que le gouvernement mette son expertise à contribution de manière plus efficace. À cette fin, le Comité interministériel québécois sur la francophonie canadienne, créé en 2005, par les ministères et organismes du gouvernement du Québec permettra une mise en oeuvre plus cohérente de la nouvelle Politique. Au Québec, l’action du Comité contribuera à informer les Québécois et le gouvernement dans son ensemble des nouveaux enjeux qui touchent les francophones du Canada, ainsi qu’à les sensibiliser aux réalités auxquelles ces derniers font face.

Dans le même esprit, le SAIC va accentuer les fonctions d’expertise et de conseil des Bureaux du Québec au Canada. À cet égard, il demandera aux Bureaux d’être davantage à l’écoute de ce qui se passe dans la francophonie, hors de la région urbaine où ils sont directement situés. J’en profite d’ailleurs pour souligner la présence aujourd’hui des chefs de poste : MM. Richard Barrette, du Bureau de Moncton; André Bachand, du Bureau d’Ottawa, et Ghislain Beaudin, du Bureau de Toronto.

Les débats qui se déroulent, au sein de la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne, sur les questions intergouvernementales en matière de francophonie canadienne ainsi que les accords de coopération interprovinciale constituent d’autres leviers d’importance. En intensifiant ses échanges et le transfert d’expertise avec les gouvernements des provinces et des territoires, le Québec entretient un dialogue favorable à la mise en oeuvre de politiques destinées à renforcer le statut de la langue française partout au Canada.

Du même souffle, le gouvernement du Québec affirme son intention de travailler davantage avec le gouvernement fédéral à la cause de la francophonie canadienne, dans le respect des compétences de chacun.

Afin d’offrir aux communautés francophones et acadiennes des moyens tangibles et durables de consolider le statut du français au Canada, le gouvernement du Québec révise et resserre ses programmes de soutien financier. Le Programme d’appui à la francophonie canadienne soutiendra, en priorité, la réalisation de projets considérés comme structurants. Pour sa part, le Programme de coopération interprovinciale, grâce à sa formule de financement paritaire des projets, a pour objet le resserrement des liens de coopération entre le Québec et les gouvernements des provinces et territoires, au bénéfice de la francophonie canadienne.

Deux autres leviers, toujours à l’état de projets, viennent s’ajouter à cet ensemble. Il s’agit de la Journée de la francophonie canadienne au Québec et du Centre de la francophonie dans les Amériques. La première devrait permettre d’accroître la visibilité des communautés francophones et acadiennes au Québec, tandis que le second contribuera à la promotion et à la mise en valeur d’une francophonie vivante, dynamique et porteuse d’avenir pour la langue française.

Les mécanismes de concertation

Après les actions et les leviers, il nous faut encore des mécanismes de concertation afin de préciser les besoins et les priorités des communautés francophones et acadiennes, mais également afin de convenir avec les communautés et la société civile québécoise des objectifs prioritaires à réaliser pour le rayonnement du fait français. Dans cette perspective, le gouvernement du Québec institue de nouveaux lieux de dialogue et d’échanges, soit un Comité jeunesse, des comités régionaux, un Comité pancanadien, tout en reconduisant le Forum triennal de la francophonie.

Le Comité jeunesse travaillera à raffermir les liens entre les jeunes du Québec et les jeunes Franco-Canadiens. Quant à eux, les quatre comités régionaux, ceux de l’Acadie, de l’Ontario, de l’Ouest et des Rocheuses, planifieront, pour les communautés qu’ils représentent, des activités à soutenir, à promouvoir ou à mettre en oeuvre dans les divers domaines visés par la Politique. Le Comité pancanadien devra, pour sa part, établir une planification stratégique triennale, de même que des plans d’action annuels. Enfin, un Forum de la francophonie triennal permettra d’élargir la concertation, suivant des besoins sectoriels, en donnant la parole au plus grand nombre d’intervenants possible.

Les actions à l’appui de la politique

Laissez-moi, avant de terminer, vous énumérer les dix exemples d’action à l’appui de la Politique, annexées à cette dernière. Sans être exclusives, ces actions sont d’une grande importance puisqu’elles confèrent à la Politique une dimension pratique plus immédiate. Avec le temps, je suis persuadé que d’autres initiatives pourront s’ajouter à ce premier corpus d’actions et ainsi enrichir notre expérience commune.

Le gouvernement du Québec souhaite donc :

  1. Assurer la présence des communautés francophones et acadiennes aux activités soulignant le 400e anniversaire de la ville de Québec;
  2. Tenir un Forum sur les arts et la culture;
  3. Appuyer la diffusion au Québec des auteurs et de la littérature des communautés francophones canadiennes;
  4. Encourager la diffusion accrue du cinéma francophone et québécois au Canada;
  5. Amorcer une collaboration entre Bibliothèque et Archives nationales du Québec et les diverses bibliothèques de la francophonie canadienne;
  6. Créer de nouvelles bourses de la francophonie canadienne (une bourse doctorale de 25 000 $ et cinq bourses de maîtrise de 7 000 $ seront accordées à des étudiants francophones d’autres provinces qui souhaitent poursuivre leurs études au Québec);
  7. Développer des réseaux de chercheurs sur la francophonie canadienne entre universités francophones du Québec et de l’extérieur;
  8. Élargir l’espace économique francophone par des initiatives comme les Rendez-vous Acadie-Québec;
  9. Promouvoir l’expertise québécoise en matière d’entrepreneuriat auprès des milieux d’affaires francophones du Canada;
  10. Étendre l’offre de services de santé en français grâce au renouvellement pour trois ans du prêt d’un expert du réseau de la santé québécois auprès de la Société Santé en français.

Je souhaite en terminant remercier, de manière toute particulière, le secrétaire général associé du SAIC, M. Camille Horth; la secrétaire adjointe, Mme Sylvie Lachance; le directeur du département de la Francophonie et des Bureaux du Québec au Canada, M. Jean-Pierre Gagnon, ainsi que toute leur équipe pour le travail colossal qu’ils ont accompli depuis 2004 relativement à cette politique. J’en profite également pour remercier tous les autres membres du personnel qui ont contribué de près ou de loin à faire de cette politique et de ce lancement un succès. J’adresse aussi des remerciements particuliers au Premier Ministre, M. Jean Charest, pour son appui indéfectible dans ce dossier.

Chers amis, la nouvelle Politique du Québec en matière de francophonie canadienne vient confirmer la volonté du Québec de s’engager avec enthousiasme, confiance et détermination dans l’avenir de la francophonie canadienne.

Il appartient maintenant à tous les francophones et francophiles, qu’ils vivent au Québec ou ailleurs au Canada, d’être et de rester solidaires et de continuer de faire entendre leur fierté de parler français. Jamais un gouvernement au Québec n’a fait autant pour renforcer les liens entre les Québécois et Québécoises et les autres francophones du Canada. En 2004, j’avais annoncé que le Québec était de retour dans la francophonie canadienne. Aujourd’hui, chers amis, j’ai le plaisir de vous dire que le Québec, qui a effectivement réintégré le giron de la francophonie canadienne, est là pour y rester.

Merci !